L'Europe est-elle devenue la pépinière des courses mondiales ?

13/09/2023 - Actualités
Depuis plusieurs saisons, on assiste à un exode des performers de 3 ans et plus vers des pays à la puissance financière grandissante. Pour preuve, parmi les 132 engagés de la Melbourne Cup, seuls 15 sont entraînés en Europe. Pourtant, plus de la moitié d’entre eux sont nés en Europe et ont rejoint l’Australie au cours de leur carrière.

 Vainqueur de Groupe en France, Gold Trip a depuis rejoint l'Australie où il a gagné la Melbourne Cup


Attirer de nouveau propriétaires et fidéliser les investisseurs existants est l’une des missions principales de France Galop. Pour cause avec les parieurs, ce sont les propriétaires qui financent la filière dans sa globalité. Pour cela, diverses stratégies sont mises en place, comme une communication massive et ciblée, mais aussi les primes propriétaires, qui encouragent également l’achat de chevaux français. Malgré cela, le problème du nombre de chevaux à l’entraînement reste encore central. Plusieurs facteurs peuvent expliquer ce phénomène, notamment la hausse des coûts des matières premières, qui entraînent de facto une hausse des coûts d’entretien des chevaux à l’entraînement.

 
     Les coûts d'entretien des chevaux à l'entraînement ne cesse de grimper ©APRH
 

Si l’on a longtemps cru que l’Angleterre et ses propriétaires fortunés et passionnés étaient imperméables à toute hausse des dépenses mensuelles pour leur protégé, ce constat semble être de moins en moins vrai. De fait, la hausse des frais conjuguée à des allocations médiocres a fini par rebuter certains investisseurs. Ainsi depuis plusieurs saisons, les propriétaires britanniques n’hésitent plus à vendre leurs chevaux en cas de belle offre. En France, ce modus operandi est fréquent pour l’obstacle, où les irlando-anglais ont des moyens supérieurs et mettent la main sur les meilleurs jeunes performers. Le même phénomène s’opère de plus en plus souvent désormais avec les bons chevaux de plat outre-Manche. Les anglais ont trouvé plus costauds qu’eux !

 
  Gai Waterhouse, entraîneur leader en Australie est friande des performers européens
 
 
Récemment, le légendaire John Gosden tirait la sonnette d’alarme, déclarant que les courses anglaises étaient en train de devenir la pépinière du monde. Afin d’illustrer cela, prenons l’Irish Champion Weekend. Deux des quatre Grs.1 du samedi au Curragh, dont l’Irish St Leger, n’avaient réuni que 4 partants. Dernier classique anglais de la saison, le St Leger de Doncaster n’a pas réussi à passer le cap des 10 partants. Mais où sont passés les chevaux ? D’anciens ou nouveaux acteurs de la planète galop ne cesse de voir leur appétit croître. Le meilleur exemple étant l’Australie. Souvent loué pour son avant-gardisme et son dynamisme, le pays-continent est celui où l’on retrouve le plus de courses proposant des allocations supérieures à 1 million de dollars. On en compte 90, contre une soixantaine aux USA, et seulement une trentaine en Europe ! De quoi motiver les investisseurs.
 
 
 John Gosden, un entraîneur inquiet de cette fuite des talents
 
 
Il y a quelques jours, la liste des engagés pour la fameuse Melbourne Cup (Gr.1) a été diffusée. Sur les 132 engagés, seulement 15 sont entraînés en Europe, dont 3 en Angleterre. Pays vainqueurs lors des dernières années, la France et l’Allemagne ne comptent aucun représentant. Certes, les coûts de déplacement (non pris en charge par l’organisateur), la longueur du voyage et le contrôle vétérinaire ultra strict peuvent être dissuasifs. Ces paramètres étaient déjà valables il y a 10 ans. Cette époque où les français Américain et Dunaden, prenaient le départ de la course en compagnie de plusieurs nombreux anglo-irlandais comme Red Cadeaux, Big Orange ou Red Verdon semble révolue.
 
 
Dunaden, héros de la Melbourne Cup 2011 pour l'entraînement de Mikel Delzangles
 
 
Pourtant, à la lecture de la liste des engagés, un constat saute aux yeux. Sur les 132 engagés, 71 portent après leurs noms la qualification (GB), (IRE), (FR) ou (GER), soit plus de la moitié. Pour l’écrasante, voire la totalité d’entre eux, ces chevaux ont été acquis après leurs bonnes performances en Europe. C’est le cas des ex-français Gold Trip (lauréat de Gr.2 en France, et tenant du titre de la Melbourne Cup ndlr), Athabascan (placé de Listed chez André Fabre), ou Carini (2e du Prix Vulcain L., vendu 600 000€). Sans oublier les vainqueurs de Gr.1 en Europe Alenquer, El Bodegon et le 2e de Derby d’Epsom Hoo Ya Mal. Cette fuite de talents est-elle le symbole du déclin du Vieux-Continent ? En partie. Malgré tout, ce constat alarmiste est à pondérer, lorsque l’on observe le chiffre d’affaires réalisé lors des différentes ventes de yearlings en Europe. La grande majorité des jeunes éléments resteront à l’entraînement en Europe. Cependant, il faudra surveiller les effets à long terme de cette exode massif, qui pourrait fragiliser le programme des chevaux d’âge. 

 

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